Prenons la réalité pour des virtualités. 3ème partie

La VR de Vincent Ravalec, 3ème partie.

Si nous entrons de plain-pied dans une dimension où les choses sont un poil différentes, alors il est évident que l’espace et le temps, ces deux notions si familières (et pourtant si relatives et fluctuantes) vont être au cœur du dispositif de FAN CLUB.

C’est à la fois ce qui va en fonder l’expérience, mais également le propos autour duquel s’articulera la narration, les sensations et la réflexion qui en découle.

On le sait, depuis Galilée et Einstein, le Temps et l’Espace sont intimement mêlés, soumis à des Lois qui les rendront différents de ce à quoi nos sens et notre raison nous ont accoutumés. À tel point que certains physiciens n’hésitent pas à dire que temps et espace n’existent pas vraiment, qu’ils sont la conséquence de lois qui peuvent être abrogées pour peu que l’on regarde les fluctuations du monde  et de l’énergie avec des lunettes  adaptées.

Si le Temps et l’Espace sont une sorte d’illusion, statut que notre raison à bien du mal à penser, il est par contre certain qu’il existe un temps et un espace qui sont eux parfaitement relatifs, car soumis entièrement à notre subjectivité.

Il s’agit bien sûr de l’espace/temps émotionnel.

Tout le monde le sait et l’expérimente quotidiennement, l’appréhension temporelle d’un événement sera vécue différemment selon le plaisir, le déplaisir, l’ennui ou l’engouement avec lequel nous l’abordons.

Notre relation à l’espace également. Nous trouvons tel endroit, plus grand ou plus petit, plus présent ou plus beau, selon des critères qui n’ont rien d’objectif.

Dans le cas de Fan Club, nous sommes, par l’effet que procure la VR, dans une configuration qui exacerbe encore cette distorsion. Non seulement le simulacre de réalité, les sollicitations du 360, nous plongent dans un endroit où tout est différent, mais aussi où tout est permis. Dans un casque VR, pour peu qu’on vous entraîne suffisamment loin, votre horloge est totalement déconnectée de la réalité. Seul compte, pendant le temps du voyage, ce que vous allez éprouver.

Et de fait,  le projet repose sur le ressenti sensationnel subjectif d’un même événement : la mort accidentelle d’une dizaine de personnes.

C’est l’écho de ce drame,  reliant un petit groupe d’individu, qui va être mis en scène, déployé, scruté, pour que, de façon palpable (enfin aussi palpable que la VR peut l’être) le spectateur puisse sentir, voir, et presque toucher, par des démultiplications de mécanismes d’horloger, des entrelacs de montres, des labyrinthes de rouages, des oscillations de balanciers, la réalité tangible de ce temps auquel notre cœur est si sensible, et que notre mémoire remodèle constamment pour en faire, si ce n’est une madeleine, en tout cas un objet singulier et commun à la fois.

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